Le secteur de l’intelligence artificielle (IA) ne cesse d’attirer des investissements massifs à l’échelle mondiale. La semaine dernière, le fonds d’investissement Serena, basé à Paris, a annoncé une levée de 200 millions d’euros destinée à soutenir des projets d’IA appliquée et des initiatives liées à la transition énergétique.
Cette opération s’inscrit dans un contexte où l’Europe cherche à renforcer sa souveraineté technologique et à développer un écosystème compétitif face aux géants américains et asiatiques. Mais au-delà du montant, c’est la stratégie derrière cet investissement qui interpelle : soutenir des solutions concrètes et durables, capables de transformer à la fois les entreprises et la société.
Serena Capital : un acteur majeur du capital-risque en Europe
Un fonds reconnu dans la French Tech
Créé en 2008, Serena Capital s’est imposé comme un acteur incontournable du capital-risque européen. Spécialisé dans le financement des entreprises innovantes, il accompagne des startups dans les domaines du numérique, du logiciel SaaS, de la deeptech et désormais de l’IA appliquée. Le fonds revendique une philosophie simple : investir dans des projets ayant un impact économique réel et un potentiel d’expansion internationale.
Une vision orientée long terme
Contrairement aux fonds cherchant un retour rapide, Serena privilégie une approche durable, basée sur le soutien aux entrepreneurs à toutes les étapes de leur croissance. Cette levée de fonds confirme sa volonté de rester en première ligne sur les technologies émergentes, en particulier l’IA responsable et la green tech.
Pourquoi un intérêt sur l’IA appliquée ?
L’IA appliquée, levier de compétitivité
L’IA appliquée désigne des solutions technologiques directement intégrées aux processus métier : automatisation industrielle, optimisation logistique, amélioration de la productivité énergétique, ou encore traitement de données médicales.
Contrairement aux modèles d’IA purement expérimentaux, l’IA appliquée vise des cas d’usage concrets, générateurs de valeur immédiate.
Des domaines prioritaires identifiés
Serena souhaite financer des projets dans plusieurs secteurs :
- Énergie et climat : réduction des émissions, réseaux intelligents, efficacité énergétique.
- Santé : diagnostic assisté par IA, optimisation des essais cliniques.
- Industrie 4.0 : automatisation des chaînes de production, maintenance prédictive.
- Services financiers : gestion des risques, cybersécurité, conformité réglementaire.
L’IA au service de la transition énergétique
Un défi global
La transition énergétique constitue l’un des enjeux majeurs du XXIe siècle. Les entreprises et les gouvernements cherchent à atteindre la neutralité carbone, réduire la dépendance aux énergies fossiles et développer des solutions durables.
L’IA apparaît ici comme un accélérateur clé, capable d’optimiser la consommation et de favoriser une production plus propre.
Exemples d’application
- Réseaux électriques intelligents (smart grids) : prédiction de la demande, équilibre entre production et consommation.
- Énergies renouvelables : optimisation de l’intermittence solaire et éolienne grâce à des algorithmes prédictifs.
- Bâtiments intelligents : réduction des dépenses énergétiques via une gestion automatisée.
- Transport et mobilité : amélioration de l’efficacité énergétique dans la logistique et les véhicules électriques.
L’Europe veut combler son retard
Face aux États-Unis et à la Chine
Aujourd’hui, les géants de l’IA restent dominés par des acteurs américains (OpenAI, Google DeepMind, Anthropic) et chinois (Baidu, Alibaba, Tencent). L’Europe accuse un retard structurel, notamment en matière de financement et d’infrastructures. Avec ce fonds, Serena ambitionne de combler une partie du gap en stimulant la recherche appliquée et en soutenant les startups locales.
Une dynamique européenne renforcée
Cette initiative s’inscrit dans une série d’annonces similaires :
- Mistral AI, licorne française, a récemment levé plusieurs centaines de millions.
- Hugging Face, plateforme open source, attire de nouveaux partenariats stratégiques.
- Les gouvernements européens lancent des plans de financement massifs pour le cloud souverain et les infrastructures IA.
Opportunités économiques et industrielles
Création d’emplois et d’écosystèmes
Le financement de projets en IA appliquée aura un impact direct sur l’emploi qualifié : ingénieurs en machine learning, data scientists, spécialistes en énergie et en cybersécurité. En parallèle, il contribuera à la formation d’écosystèmes régionaux autour des pôles technologiques, particulièrement à Paris, Lyon, Berlin et Amsterdam.
Compétitivité accrue des entreprises
En intégrant l’IA dans leurs processus, les entreprises européennes pourront gagner en productivité, réduire leurs coûts et améliorer leur résilience. Cela devient crucial dans un contexte de crises multiples : inflation, tensions géopolitiques et transition climatique.
Les défis à relever
Risques technologiques
La dépendance aux données massives pose des questions sur la sécurité, la confidentialité et la propriété intellectuelle. Les modèles doivent être entraînés avec des données fiables et éthiques.
Gouvernance et réglementation
L’Union européenne a déjà lancé l’AI Act, visant à encadrer le développement des systèmes d’IA. Serena devra veiller à investir dans des projets conformes aux normes européennes, tout en maintenant une capacité d’innovation.
Concurrence mondiale
Les fonds européens restent bien inférieurs aux capitaux américains et asiatiques. La compétition ne se jouera pas uniquement sur les financements, mais aussi sur la rapidité d’adoption et la création d’infrastructures locales.
Perspectives
La levée de 200 millions d’euros par Serena illustre une nouvelle dynamique : l’Europe veut se positionner comme un acteur crédible dans l’IA et la transition énergétique. L’objectif n’est pas seulement économique, mais aussi stratégique et sociétal : renforcer la souveraineté numérique, réduire les émissions carbone et offrir des solutions concrètes aux citoyens.
Conclusion
La décision de Serena d’investir massivement dans l’IA appliquée et la transition énergétique marque une étape importante pour l’Europe. Elle témoigne d’une volonté d’agir concrètement sur les grands défis de demain : compétitivité industrielle, durabilité environnementale et souveraineté technologique. Si les défis restent nombreux, cette initiative démontre qu’un nouveau cap est franchi. L’IA ne se limite plus à la recherche théorique, mais devient un outil pratique, au service d’une économie plus verte et plus efficace.
